Rien ne prédisposait Charlie à devenir camgirl. A 17 ans, elle se tourne vers la carrière de comédienne classique. Elle enchaîne les contrats, jusqu’au jour où les propositions se font plus rares, voire inexistantes. Il y a 4 ans, pour vivre, elle accumule les petits boulots jusqu’au jour où elle tombe sur une annonce pour devenir animatrice webcam. Un univers qu’elle ne connait pas du tout. La comédienne est assez éloignée du monde du porno, de l’industrie pour adultes et encore plus de l’univers de la camgirl. Mais rapidement, elle comprend ce que c’est et se lance dans l’aventure. A 37 ans aujourd’hui, elle nous raconte comment cette nouvelle vie à commencé :

Charlie : Au départ, je me posais plein de questions et j’avais très peur. Peur de ne pas être capable, peur de ne pas y arriver. Est ce qu’on doit satisfaire toutes les demandes des gens, tous leurs fantasmes ? Et s’ils me demandent quelque chose que je ne sais pas faire ?

J’appartiens encore à cette génération pour qui les sex-shops étaient tabous, honteux. Ce n’était pas démocratisé comme maintenant. Ceux qui allaient dans des sexhops avaient honte, ils se cachaient. Aujourd’hui c’est fun d’aller dans un sex-shop. Quand on a toutes ces idées, cette morale bien ancrée dans la tête, devenir camgirl, ça pose effectivement pas mal de questions. Ce travail va à l’encontre de la morale, c’est un peu l’archétype de la pute qui gagne de l’argent avec son corps. C’était pas évident à assumer la première fois.

Vous vous souvenez justement de cette première fois comme camgirl ? Charly camgirl

Quand j’ai branché ma cam la première fois, sur le moment, c’était très simple. C’est après que tout s’est compliqué? Quand j’ai éteint la cam. Quand j’ai repensé à ce que j’avais fait. C’était comme une prise de tête, comme une nécessite de régler des comptes avec une morale qui n’est pas forcément la sienne. Tout le conditionnement sur ce qui est bien ou pas, sur le fait que tel acte fait de nous une personne bien et tel autre une mauvaise personne. On juge plus les gens sur ce qu’ils font que sur ce qu’ils sont réellement. Avec le recul, je m’aperçois que ce travail de camgirl est un super outil d’évolution personnelle parce qu’il oblige à se réinterroger sur tout cela. C’est une chose de se dire intellectuellement « je ne vois pas où est le problème », c’en est une autre de le faire et de se heurter à sa propre morale et à ses propres résistances. Et puis au début, j’avais toujours peur d’arnaquer les gens, de ne pas leur en donner assez, du coup, j’allais trop vite. Les hommes me disaient « C’est infernal, j’ai pris un show de 30 mn et au bout de 5 mn tu m’a fait éjaculer, tu vas top vite. T’es trop à fond !« . Enfin, il y a un autre préjugé qui est tombé en faisant ce travail. C’est sur les hommes qui viennent sur les sites de cam girls. Je pensais me trouver face à des vieux pervers qui veulent mater. Et c’est pas du tout cela. La moyenne des hommes qui viennent sur ma cam a entre 20 et 40 ans, certains sont même en couple. Je pensais avant que j’allais voir défiler toute la misère sexuelle mais en fait c’est pas du tout cela.

« Quand je fais des shows privés, je propose une performance sexuelle. Je suis une travailleuse du sexe »

Pour vous ces hommes, ce sont des voyeurs, des clients ? Comment les considérez vous ?

Moi je les appelle des clients. Beaucoup de camgirl ne vont pas aimer ce que je vais dire mais je considère que je fais de la prostitution virtuelle. Et j’assume cela. C’est un service sexuel tarifé. Donc de la prostitution sexuelle. Sur les sites, on les appelle pudiquement des voyeurs, des mateurs, mais moi je les appelle des clients. Si on est honnête deux secondes, c’est de cela dont il s’agit. Surtout quand je fais des shows privés, je propose une performance sexuelle. Je suis un travailleuse du sexe. Il faut sortir du tabou qui prétend que si on dit pute ou prostituée, c’est mal. Pourquoi est ce mal ?

Est ce que vous avez aussi des fans parmi vos clients ?

C’est vrai qu’il y a des hommes qui reviennent souvent parce qu’ils aiment ce que je fais. En fait il y a deux sortes de fans. Il y a d’un côté ceux qui aiment les live show, que ce soit sur skype ou sur les plateforme de cam et qui vont venir pour me voir en privé. Et il y a tous ceux qui suivent mon site, qui se contentent de parler avec moi, de m’écouter à la radio et qui n’ont aucune envie de me voir en show. Mais je ne sais pas si on peut les comparer à des fans d’actrices porno. Déjà, je ne fais jamais de shows en couple et tout reste en virtuel. Il n’y a jamais de contact physique. Ce qui n’empêche pas la réalité de la relation. Je vois bien que d’un show privé à l’autre, cela change complètement parce qu’on sent l’énergie sexuelle de la personne. C’est vrai qu’il  y a une forme d’intimité qui peut se créer avec la personne. C’est comme dans la vie, on a plus d’affinités avec certaines personnes que d’autres. Il y en a pour lesquelles j’ai énormément d’affection et je sais que certains ont eu des coups de cours pour moi. Mais je sais aussi que tout cela reste virtuel parce que c’est avant tout un travail.

Charly camgirl

 

Est ce que votre travail de camgirl a changé votre regard sur les hommes ?

Non,je ne crois pas. Ca a ouvert mon regard sur pleins d’expressions différentes de la sexualité, ça m’a permis de mieux appréhender peut être la fascination qu’éprouvent certains hommes pour le sexe féminin. Un grand mystère pour certains, qui aimeraient le remplir tant et plus et qui les intrigue, parce que c’est différent d’eux. Mais non, ça n’a pas changé mon regard sur les hommes. En cam comme dans la vie, il y a des hommes doux, d’autres plus violents, des hommes sûrs d’eux, d’autres timides, des hommes qui aiment dominer, d’autres qui préfèrent la soumission.

Non, ça n’a pas changé mon regard sur les hommes, et je crois qu’au delà du genre masculin / féminin, il faut se rappeler qu’on est avant tout des êtres humains, avec au final des grandes lignes comportementales qui ne varient pas tant que ça. Tout dépend de l’histoire personnelle de chacun. Il y a chez les humains, hommes et femmes confondus, les preneurs, les victimes, les sauveurs, les indifférents. Et on a tous, en chacun de nous, la possibilité d’être tout cela. Mais, c’est en m’intéressant à l’humain, à la conscience, que je m’en suis aperçue.

Les cam ce n’est pas votre seule activité. Il y a un blog avec de très nombreuses rubriques, une web radio, les réseaux sociaux. Vous n’arrêtez jamais !

Quand j’ai commencé comme camgirl, mon copain ma conseillé de faire un site avec des photos et des vidéos pour les fans. Pour qu’ils puissent me retrouver s’ils voulaient en savoir plus sur moi. C’est aussi à ce moment que j’ai acheté des sextoys. C’est dans une certaine mesure mon outil de travail. Très vite je me suis demandé comment choisir un bon sextoy devant la quantité qui existe. Il y en a tellement que c’est impossible de savoir s’ils sont bien ou pas. C’est comme cela que nous avons commencé à faire des tests de sextoys et à les publier sur mon site. Je fais tout à visage découvert, je fais un petit texte et une vidéo pour montrer à la fois comment l’utiliser et que c’est bien moi qui teste l’objet. Rapidement, il y a une boutique puis une autre et encore une autre qui m’ont contactée pour me demander de faire des tests pour eux. Le blog s’est aussi enrichi d’articles sur la sexualité, sur la société parce qu’en partant de la sexualité, on peut parler de tout. L’intolérance au niveau de la sexualité va rejoindre l’intolérance vis à vis d’autres choses.

Et on vous retrouve aussi sur une web radio…

J’ai été invitée comme camgirl sur LSF radio et en discutant avec eux, je leur ai expliqué que j’étais comédienne et que j’aimerais bien faire une émission de lectures érotiques où je pourrais venir lire des textes ou des extraits d’oeuvres érotiques. Tout de suite ils ont dit oui. Au fur et à mesure, il y a plein de choses qui se sont construites autour de la sexualité et qui ouvrent à d’autres thèmes. Je peux parler d’écologie, de spiritualité, de conscience de soir, des autres. On me retrouve dans le “Morning de Charlie » et dans “Lecture érotique de Charlie“

« Je ne disais pas que j’étais comédienne, j’avais peur que les hommes pensent que je simule et donc que je les arnaque »

Vous vous définissez comme une « travailleuse du sexe », toutes vos prestations se font à visage découvert, cela n’a jamais posé de problème pour votre entourage ?

Au départ je cachais plein de choses. Je cloisonnais tout parce que je pense que j’avais une forme de honte. Bien sûr j’en ai parlé avec mon copain avant même de commencer, mais en dehors de lui, personne ne savait. J’ai raconté à ma famille et à mes amis des histoires incroyables qui changeaient régulièrement. En cam, je ne disais pas non plus que j’étais comédienne parce que j’avais peur que les hommes pensent que je simule et donc que je les arnaque. Cette idée de l’arnaque, j’y pense tout le temps. Ca doit être une petite névrose qui traine quelque part. Je ne disais pas non plus que j’étais en couple parce que je pensais qu’il fallait que les hommes croient que quelque chose était possible. Et un jour, j’ai fini par tomber le masque. J’ai dit à mon entourage ce que je faisais, j’ai raconté mon parcours sur mon site. J’ai un souci de transparence. Donc maintenant tout le monde sait que je suis en couple et d’où je viens. Je n’étais pas à l’aise de faire croire que quelque chose pouvait se passer en réel parce qu’en fait ça n’arrivera pas. La relation est virtuelle et reste dans la virtualité. Comme cela tout est plus simple, il n’y a pas de risque de confusion. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’intimité avec les hommes. Il y a vraiment des moments de jouissances que ce soit pour moi ou pour la personne en face. Automatiquement, quelque chose se crée entre nous. Mais cela s’arrête dès que le show s’arrête.

Parallèlement, vous donnez des cours de théâtre des adolescents. Ils connaissent votre implication dans ce monde du sexe, votre métier de camgirl ?

A la rentrée des dernières vacances de noël, j’ai eu un appel du centre social avec lequel je travaille. Certains des adolescents sont tombés sur des vidéos porno et ils étaient persuadés que c’était moi. Donc je ne me suis pas cachée et j’en ai parlé avec les élèves parce que c’est important de parler. C’était intéressant parce que ce sont des gamins qui ne parlent jamais de cul entre eux. Donc je leur ai dit que c’était bien moi, je leur ai demandé si cela posait un problème, si cela changeait quelque chose, s’ils avaient un problème de respect, s’ils voulaient qu’on continue à travailler ensemble, s’ils avaient des questions. J’ai essayé de tout mettre sur la table en disant « on en parle maintenant et après on ferme cette parenthèse pour reprendre l’atelier d’acteur normalement« . Mais c’est vrai que j’avais avec une réelle appréhension. Ce sont des gamins de quartiers dits défavorisés et je craignais leurs réactions. Mais tout s’est super bien passé. Parce qu’à aucun moment j n’ai eu honte de ce que je faisais. Et surtout cela a permis par la suite d’aborder avec eux les thèmes de la sexualité, du rapport aux autres, de la tolérance. Donc c’était vraiment intéressant pour cela.

Vous vous imaginez où dans 10 ans ?

Je n’en ai pas la moindre idée. Je fais ce travail depuis 4 ans, tout le temps que j’y prends du plaisir, je continue à le faire mais je suis incapable de me projeter dans le futur. En fait je n’ai jamais su le faire. A 15 ans, je ne savais pas ce que je ferai à 25 et c’est pareil maintenant. Je me doute que je ne vais pas être camgirl jusqu’à 70 ans. Pour l’instant je continue à voir ce qui se présente à moi, sans avoir de réel plan de carrière.

Charly teste des sextoys pour son site et les utilise dans ses séances de camgirl. Retrouvez l’interview qu’elle nous a accordée sur ce sujet. En attendant, faisons la connaissance de Renaud son compagnon.

Renaud, compagnon de Charly : « Je m’en fous complètement »

Quand on parle avec Renaud du travail de camgirl de sa compagne, l’expression qui revient le plus souvent au sujet du du travail de sa compagne est “Je m’en fous complètement“. Indifférence ? Sans doute pas tant que cela, il reconnaît volontiers être très jaloux. Explications.

Sexhightech : Comment vit-on avec une camgirl ?

Renaud : On passe par plein de stades différents. Au départ, c’est très flippant de la voir avec tous ces mecs qui la matent. Après on est très content, c’est assez flatteur. Enfin on repasse par une phase flippante quand elle commence à utiliser les godes. Parce qu’ils sont inusables. Alors que moi je suis “usable“. Faire l’amour 5 ou 6 fois par jour, c’est bon à 20 ans mais à 40 ans, ce n’est plus la même chose. Le moment le plus intéressant en fait, c’est maintenant parce que je m’en fous complètement. Au départ j’ai une sexualité un peu décalée, j’ai accordé une importance considérable au sexe, j’adore ça mais maintenant je suis arrivé à un stade où je m’en fous complètement. S’il y a du cul tant mieux, s’il n’y a pas de cul tant pis. Je m’en fous.

Il y a de la jalousie ou de la fierté de voir tous ces hommes s’exciter sur votre compagne ? confession Charly cam girl

Il y a les deux, alternativement et simultanément et autre chose. En fait à l’heure actuelle, je m’en fous complètement. D’une certaine manière cela nous a permis de nous rapprocher en nous détachant l’un de l’autre. Au départ, on est super fusionnels. Son travail de camgirl nous a apporté du détachement. Ce n’est plus ma compagne, c’est Charly. Je reste très jaloux mais il y a vraiment le moins possible de possessivité. Elle ne m’appartient pas ! Au départ, mon fantasmes c’était de voir 2 ou 3 mecs pour une femme. Alors qu’en général, les hommes veulent le contraire, 2 ou 3 femmes pour eux. Donc les cam entretiennent un peu ce fantasme. Mais il n’y a pas vraiment de fierté, à part peut-être par rapport aux bien-pensants ou qui se prennent comme tels et qui la côtoient sans savoir ce qu’elle fait. Quand on leur dit, parce qu’on ne s’en cache pas, j’adore le moment où l’on voit la surprise et le jugement dans leurs yeux.

Ce sexe virtuel vous rassure ou vous auriez eu la même attitude si elle avait été actrice porno ?

Je fais une grosse différence entre faire un film pour le plaisir et faire une carrière porno. Le coté virtuel estompe beaucoup de choses en fait. C’est clair qu’avec la cam virtuelle, il n’y a pas de soucis.

Au départ, quand elle m’a dit soit je fais camgirl soit je vais travailler dans l’immobilier. J’ai tout de suite préféré la cam. Je connais un peu le monde de l’immobilier et quitte à aller niquer ailleurs, autant que ce soit en cam. Au moins ce sera clair. Entre se faire tripoter par un abruti quelconque et se goder devant un inconnu en cam, même s’il y a une relation affective avec cet homme, je préfère quand même le virtuel. Je suis plutôt en mode “Lassie chien fidèle“ mais je lui ai toujours dit que si elle avait envie d’aller niquer ailleurs, elle devait y aller mais je ne veux pas de troisième brosse à dent à la maison.

 

Images : Charly – LSF Radio

Sex High Tech
2 Comments
  • Charlie et les sextoys connectés, pour donner le contrôle aux hommes - Sexhightech
    02/06/2018 - 23:43

    […] est camgirl mais comme vous l’avez vu dans son interview, elle est beaucoup plus que cela. Camgirl donc mais également blogueuse, active sur les réseaux […]

  • LiveCam, plongez dans l'univers rentable et mystérieux des camgirls
    02/06/2018 - 19:30

    […] Les Camgirls françaises ne sont pas en grand nombre, vis à vis de pays comme la Colombie, la Roumanie, l’Ukraine ou la Russie, mais certaines ont réussi à se faire une belle place et sont devenues de vraies professionnelles par les sommes gagnées et par le développement de leurs sites personnels. Certaines d’entre elles ont fait les titres des magazines spécialisés, ont été les vedettes de reportages télévisés ou ont fait la couverture de magazines célèbres dans le monde de l’adulte. […]

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